« Les filles du feu » est un recueil de nouvelles de Gérard de Nerval publié en 1854. Erudites, hermétiques, parfois insolites ou ésotériques, d’aspect hétérogène, les nouvelles qui composent le recueil constituent une des œuvres majeures de l’écrivain.
La composition
Alors qu’il est interné à la clinique psychiatrique du Docteur Blanche pendant l’automne 1853, Nerval a l’idée des « Filles du feu ». La composition et la parution de « Sylvie » en novembre 1853 lui donnera l’idée de réunir des textes antérieurs, et de composer d’autres nouvelles pour finalement donner le recueil que l’on connait.
Au total, les nouvelles suivantes seront inclues dans « Les filles du feu »: Angélique, Sylvie, Chansons et légendes du Valois, Jemmy, Octavie, Isis, Corilla, Emilie.
La récurrence des thèmes Nervaliens
Le voyage : Nerval erre dans Paris, se rend dans le Valois, voyage en Allemagne, dans le sud de la France, en Italie. Gérard de Nerval est en vie quand il voyage. Voyager est ce qui lui permet de rêver et de se souvenir. Du rêve et du souvenir naissent l’envie d’écrire propulsés par l’imaginaire.
Le souvenir : Il se souvient dans « Angélique », dans les « Légendes du Valois », dans Sylvie…Le voyage facilite le souvenir. La projection dans l’espace permet la projection dans le temps, réel, puis imaginé.
Le rêve : le rêve est l’étape naturelle qui fait suite au souvenir. Du temps revécu, libéré des contraintes du présent et de l’espace, on passe au temps imaginé. Tout devient possible. La vie n’est plus un enfer, elle est légère, faite de possibles, légers comme l’air et non pas lourds à soulever comme des montagnes.
L’écriture : l’écriture est la quatrième étape « logique » dans la pérégrination nervalienne. Du voyage, souvenir et rêve, revient l’envie de vivre, de se « recréer », donnant naissance à l’écriture, miroir du voyage, du souvenir et du rêve, qui permet d’éterniser ce qui serait soudain trop léger pour être vivable.
Les filles du feu, prémice de l’univers proustien ?
Souvenir, rêve, naturellement, on pense à La recherche du temps perdu. Et pourtant, beaucoup de choses séparent le monde de Nerval. Voyage, folie, rapport à l’espace, fascination pour l’ailleurs et l’autre…Tout sauf la sensibilité, qui se manifeste par l’attention à des détails minuscules, laissés de côté par les « grands » romanciers trop affairés à travailler sur leur étude de caractères. « Les filles du feu » ne sont pas un prémice de l’univers proustien, mais bien l’ébauche de son chef d’œuvre, Aurélia. Les plus grandes nouvelles des « Filles du feu » comme « Angélique », « Sylvie », apportent un « ton jusqu’alors inouï dans notre littérature », comme dit André Gide. La folie mêlée à la poésie des « Filles du feu » donnera Aurélia.
©Les Éditions de Londres