Préface des Éditions de Londres

La croisade des Albigeois est la lutte entreprise par l’Église catholique au début du XIIIème siècle contre l’hérésie cathare qui se développait dans le Languedoc.

La chanson de la Croisade des Albigeois est une chanson de geste telle que les racontaient dans les châteaux les troubadours du Moyen Âge. Elle a été composée par deux troubadours : la première partie a été faite par un certain Guillaume qui prétendait avoir vécu à l’abbaye de Tudèle en Navarre comme il le dit lui-même au début de la chanson. La deuxième partie a été faite par un troubadour anonyme vraisemblablement toulousain. Guillaume de Tudèle était favorable aux Croisés, alors que l’auteur anonyme y est hostile et particulièrement admiratif des Toulousains.

La chanson a été écrite en langue provençale du Moyen Âge, nous en publions la version originale et la traduction en français moderne des Éditions de Londres. Notre traduction s’appuie sur celles faites par M. C. Fauriel, publiée en 1837 et sur celle de Paul Meyer publiée en 1875.

Les récits de la Croisade Albigeoise, connus de nos jours, sont au nombre de trois :

— La chanson de geste qui couvre la période de 1208, quand le Pape Innocent III demande à l’ordre de Cîteaux de lutter contre l’hérésie jusqu’en 1219 où elle s’arrête brusquement au moment où le roi de France Louis VIII fait un nouveau siège de Toulouse. Elle fut écrite au fur et à mesure des évènements.

— La Chronique de Maître Guillaume de Puylaurens, qui fut chapelain du comte de Toulouse Raymond VII, écrite en latin, qui couvre toute la période de 1202 où ont lieu les premiers prêches contre les hérétiques jusqu’en 1272 où le comté de Toulouse fut réuni au royaume de France.

— L’Histoire des Albigeois de Pierre de Vaulx-Cernay, écrite en latin, qui est en fait l’histoire de Simon de Montfort écrite à l’époque des évènements et qui s’arrête en 1218 à la mort de Montfort.

Origine des Cathares

Le catharisme venu d’orient, en passant par les Balkans bulgares, s’est répandu en Languedoc au XIIème siècle. À la fin de ce siècle, on comptait huit cents églises cathares dans le Languedoc. Il s’appuyait principalement sur l’évangile de Jean.

Le catharisme est une religion manichéiste qui oppose le Bien, le domaine spirituel, au Mal, le domaine matériel. Les cathares dénonçaient l’évolution vers la richesse et la corruption de l’Église romaine. Ils recherchaient une vie ascétique et généreuse.

Les églises cathares ne reconnaissaient aucune autorité ecclésiastique. Les cathares se faisaient appeler Bons Hommes et Bonnes Dames et prenaient le nom de Parfaits lorsqu’ils recevaient le consolament et s’engageait dans une vie religieuse. Les simples croyants recevaient le consolament lors de leur mort pour permettre à l’âme de quitter le corps, les Cathares croyant à la métempsycose.

La situation du Languedoc

Ancien royaume des Wisigoths rattaché à la France par Charlemagne, séparé lors de la mort de Charlemagne, puis rattaché et à nouveau séparé par Louis le Pieux qui confie l’Aquitaine à son fils Pépin.

L’antagonisme restait grand entre les Français du Nord et les gens du Midi.

Alors que les Français, dès Clovis, ont adopté la foi catholique romaine, le Midi est resté longtemps fidèle à l’arianisme en faveur dans les premiers temps de la chrétienté. Le Languedoc était de ce fait facilement hostile à l’autorité de Rome et les « hérésies » s’y développaient facilement.

L’organisation de la Croisade

Les Croisades sont organisées par le Pape. L’Église envoie des prédicateurs pour convaincre les seigneurs d’y participer.

Le Pape finance les Croisades en prélevant ses ressources sur les églises. Il accorde aux Croisés l’indulgence plénière de tous leurs péchés (qui efface les péchés passés), en échange de quoi, le Croisé doit fournir quarante jours (la quarantaine).

La Croisade est un honneur pour la chevalerie, c’est une étape indispensable pour un parfait chevalier.

La Croisade donne aussi le droit de pillage, ce qui permettait aux Croisés de récupérer les dépenses qu’ils devaient engager.

Les principaux évènements de la Croisade

La Croisade des Albigeois présente plusieurs grandes étapes. Elle est initiée par le Pape Innocent III, élu pape en 1198, pour forcer les seigneurs du Languedoc à lutter contre les hérétiques. Une fois tombées les villes de Béziers et Carcassonne, Montfort est nommé comte du Languedoc et se battra jusqu’à sa mort en 1218 pour obtenir la soumission des comtes et des villes. La croisade sera ensuite reprise par le roi Louis IX, plus dans un souci de conquête, pour finir par le rattachement du Languedoc à la France en 1171.

Les grandes étapes furent les suivantes :

— Dans les premières années du XIIIème siècle, le pape Innocent III tente de convertir les hérétiques par la prédication. On crée dans ce but l’ordre des prêcheurs itinérants. Le pape envoie Pierre de Castelnau pour convaincre la noblesse de lutter contre les hérétiques, en particulier Raymond VI, comte de Toulouse. Devant son insuccès, Pierre de Castelnau excommunie Raymond VI début janvier 1208.

— Le 14 janvier 1208, Pierre de Castelnau est assassiné à Saint-Gilles par un écuyer de Raymond VI pour le venger de son excommunication. C’est ce qui décide le pape à organiser la Croisade « des barons ». Arnaud Amaury, abbé de Cîteaux, est chargé de recruter les barons de France pour participer à la Croisade.

— En juin 1209, la Croisade se réunit à Lyon sous la conduite d’Arnaud Amaury. Le 18 juin, Raymond VI fait sa soumission à Saint-Gilles et rejoint sans conviction la Croisade.

— Le 22 juillet 1209, les Croisés prennent, par surprise, Béziers, bien qu’elle se soit bien fortifiée, et font un massacre de la population. C’est là qu’Arnaud Amaury aurait dit : « Tuez-les tous, Dieu reconnaîtra les siens. » Raymond Roger Trencavel, vicomte de Béziers, Carcassonne, Albi et Razès était alors à Carcassonne.

— Le 1er août 1209, les Croisés arrivent devant Carcassonne et le 15 août, Raymond Roger Trencavel se rend pour éviter le massacre des habitants comme à Béziers. Il est fait prisonnier et mourra en prison.

— Le 22 août, Simon de Montfort est nommé chef militaire de la Croisade et Vicomte de Béziers, Carcassonne, Albi et Razès à la place de Raymond Roger Trencavel.

— Jusqu’en juin 1211, Simon de Montfort cherche à soumettre les différentes villes par la force. Fanjaux, Pamiers, Preixan, Minerve, Termes, Lavaur sont prises, Albi se soumet.

— En juin 1211, Simon de Montfort fait un premier siège de Toulouse, il abandonne et lève le siège le 29 juin pour aller ravager le comté de Foix. Raymond VI reconstitue une armée pour reprendre les terres conquises, mais il échoue à Castelnaudary et rentre à Toulouse.

— En septembre 1213, le roi d’Aragon vient pour aider Raymond VI, mais il est tué à la bataille de Muret le 12 septembre.

— Le 8 janvier 1215, au concile de Montpellier, tous les biens du comte de Toulouse sont attribués provisoirement à Montfort.

— En novembre 1215, a lieu le concile de Latran qui confirme la dépossession de Raymond VI, le 15 décembre le pape attribue définitivement le comté de Toulouse à Simon de Montfort et le 7 mars, Montfort obtient la soumission de Toulouse.

— En mai 1216, le fils de Raymond VI, Raymond VII de Toulouse, à qui le pape a accordé le marquisat de Provence, rentre dans Beaucaire, accueilli par les habitants, et assiège le château où se trouvent les hommes de Montfort. Montfort vient assiéger Beaucaire le 6 juin, mais le 24 août il doit lever le siège.

— Le 13 septembre 1217, Raymond VI rentre dans Toulouse avec une petite troupe et il est bien accueilli par les habitants qui se révoltent contre Montfort. Le 22 septembre, Guy de Montfort arrive devant Toulouse pour en faire le siège et est rejoint par Simon.

— Le siège de Toulouse dure près d’une année pendant laquelle les habitants se défendent courageusement. Le 25 juin, Simon de Montfort est tué et le 25 juillet, le siège est levé.

— Le 2 juin 1219, le prince, futur roi Louis VIII, arrive avec une importante troupe devant Marmande pour aider Amaury de Montfort, le fils de Simon qui a hérité des titres de son père. Marmande est prise et la population massacrée.

— Le prince Louis et Amaury vont assiéger Toulouse le 16 juin. C’est là que se termine la chanson de la croisade. Toulouse tiendra et le siège est levé le 1er août et Louis rentre à Paris.

Les suites sont rapidement décrites dans notre épilogue à la fin de la chanson.

Les hommes concernés

De nombreux noms sont cités par les auteurs comme c’est l’usage dans les épopées. La plupart sont inconnus de nos jours et rechercher leur biographie ne présenterait pas de réel intérêt. L’orthographe des noms peut d’ailleurs varier en fonction des auteurs et des traductions.

Les principaux participants à la croisade sont les suivants :

Les papes Innocent III de 1198 à 1216, Honorius III de 1216 à 1227 enfin Grégoire IX de 1227 à 1241.

Les comtes de Toulouse, Raymond VI assez hésitant, puis son fils Raymond VII plus belliqueux. Raymond VII n’aura qu’une fille, mariée au frère du roi de France, Alphonse de Poitiers qui héritera du comté de Toulouse à la mort de Raymond VII et le transmettra au royaume de France à sa mort en 1271.

Les autres seigneurs occitans, vassaux des comtes de Toulouse : Raymond Roger de Trencavel, vicomte de Béziers, Carcassonne, Albi et Razès qui est fait prisonnier dès la prise de Carcassonne en 1209. Son fils Raymond II Trencavel qui tentera vainement de recouvrer ses titres et sera remis par Raymond VII dans Carcassonne pendant deux ans de 1224 à 1226. Raymond Roger, comte de Foix et son fils Roger Bernard II. Bernard IV, comte de Comminges.

Les barons de la Croisade : Eudes III, duc de Bourgogne ; Pierre II de Courtenay, comte d’Auxerre ; Hervé IV de Donzy, comte de Nevers ; Gaucher III de Châtillon, comte de Saint-Pol ; Adhémar de Poitiers, comte du Valentinois ; Guillaume des Roches, sénéchal d’Anjou.

Les ecclésiastiques contrôlant la croisade : Pierre de Castelnau, légat du pape, tué en 1208 ; Arnaud Amaury, abbé de Citeaux qui dirigea la croisade des barons ; Foulques, évêque de Toulouse.

Simon IV de Montfort, possédait de son père la petite seigneurie de Montfort-l’Amaury, entre Chartres et Paris, et du chef de sa mère le comté de Leicester. Dans la quatrième croisade, il avait suivi les chevaliers francs au siège de Zara ; puis il s’était rendu en Palestine, où il servit pendant cinq ans contre les Infidèles. Il arrivait à peine en France de son long pèlerinage d’outre-mer, lorsqu’il participa à la Croisade des barons. Après la chute de Béziers et de Carcassonne, il fut nommé par l’église Vicomte de Béziers, puis par la suite comte de Toulouse, il tentera vainement d’assurer son autorité sur le pays. Il est aidé par son frère Guy de Montfort puis sera remplacé par son fils Amaury de Montfort.

Carte du Languedoc au début du XIIIème siècle.

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Souce : Wikipedia

CHANSON DE LA
CROISADE DES ALBIGEOIS
Traduite en Français moderne