Préface des Éditions de Londres

« Les Fêtes galantes » est un court recueil de poèmes de Paul Verlaine publié en 1869. Il s’agit du deuxième recueil de Verlaine après les Poèmes Saturniens. C’est le chef d’œuvre de Verlaine.

La genèse de l’œuvre

Le recueil est publié chez le même éditeur Lemerre, et de nouveau à compte d’auteur. Comme les Poèmes Saturniens, il ne rencontre pas de succès. Inspiré des tableaux de Watteau, « Les fêtes galantes » est une suite de pantomimes qui mettent en scène les personnages de la Commedia dell’arte.

Contrairement aux Poèmes saturniens, qui peineront très longtemps avant de susciter l’intérêt des lecteurs, “Les fêtes galantes » sera reconnu comme le chef d’œuvre de Verlaine dès les années 1880.

Composé en strophes courtes, “Les fêtes galantes » rompt définitivement avec l’influence des Parnassiens encore présente dans les Poèmes saturniens.

La grâce des Fêtes galantes

Si Verlaine prône « de la musique avant toute chose », « Les fêtes galantes », c’est des tableaux mis en musique, des tableaux peints d’un fonds bucolique avec des couleurs vives qui ressortent comme des flashs de brillance, ce sont les costumes des petits personnages de la commedia dell’arte, mi-humains mi-marionnettes, des lumières qui scintillent, et se posent avant que tout ce petit monde s’endorme, le cœur brisé.

L’unité, unique en poésie, du recueil, n’a pas d’équivalent. La beauté de ces vers n’a pas d’équivalent non plus.

Dans Clair de lune,

Votre âme est un paysage choisi
Que vont charmant masques et bergamasques,
Jouant du luth et dansant et quasi
Tristes sous leurs déguisements fantasques.

 Dans Pantomime,

Pierrot, qui n’a rien d’un Clitandre,
Vide un flacon sans plus rien attendre,
Et, pratique, entame un pâté.

Dans Les ingénus,

Parfois aussi le dard d’un insecte jaloux
Inquiétait le col des belles, sous les branches,
Et c’était des éclairs soudains de nuques blanches
Et ce régal comblait nos jeunes yeux de fous.

Dans Cortège,

Un singe en veste de brocart
Trotte et gambade devant elle
Qui froisse un mouchoir de dentelle
Dans sa main gantée avec art,

Dans Fantoches

Scaramouche et Pulcinella,
Qu’un mauvais dessein rassembla,
Gesticulent, noirs sur la lune.

Et naturellement, le poème qui symbolise les « Fêtes galantes », Colombine

Léandre le sot,
Pierrot qui d’un saut
De puce
Franchit le buisson,
Cassandre sous son
Capuce,

©Les Editions de Londres