Biographie de l’Auteur

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Jean-Jacques Rousseau (1712-1778) est un philosophe français. A vrai dire, c’est plutôt un philosophe genevois de langue française, mais toute la gauche française et une partie de la droite se réclament de lui. Pourtant on ne peut pas dire que Rousseau soit un comique. Si pourtant nous considérons Rousseau comme l’un des plus grands philosophes ayant existé, si les Lumières ne seraient pas les Lumières sans lui, si c’est le troisième représentant des Lumières publié par Les Editions de Londres après Voltaire, Diderot, Rousseau, il est différent parce qu’il ne nous fait pas rire.

Rousseau et le rire

Si vous avez lu le Nom de la rose d’Umberto Eco, vous vous souvenez peut-être de ce passage où le héros principal évoque les théories d’Aristote sur le rire. Pour le chef des moines, un catéchumène rabat-joie, le rire relève du singe, pas de l’homme, et l’homme ne devrait pas rire. En Rousseau on a en germe ce qu’il y a de mieux dans l’esprit Révolutionnaire, cet idéal de liberté, cette générosité d’âme, cette sensibilité vis-à-vis de l’autre qui fait intrinsèquement défaut à la droite et la décrédibilisera toujours aux yeux des hommes, mais on a aussi ce qu’il y a de pire, à savoir, cette gêne face au rire franc et généreux, et cette sale manie de vouloir le bonheur de tous, qu’ils le veuillent ou non.

Dans la bonne société bourgeoise de droite, le rire trop franc, trop généreux est très mal vu, il est vulgaire, il est tout simplement basse classe. Dans la bonne bourgeoisie de gauche, c’est-à-dire l’intelligentsia de gauche, qui donne dans leur sous branche la plus névrosée et hermétique les germanopratins, le rire n’est pas bien vu non plus, car le rire, c’est avant tout un rire de droite, qui sent la merguez et la frite. Seul le rire travaillé, ou plutôt le rire infirme, est accepté dans les deux sociétés. En cela, pas de doute que Charasse n’ait jamais fait partie du monde socialo, son rire et les grosses blagues dont il rit lui-même dérangent.

Contrairement à Diderot, à Voltaire , à Montesquieu, à Beaumarchais, il n’y a pas de rire chez Rousseau. Chez Rousseau, point de Rabelais, qui forme sûrement avec Villon l’expression la plus achevée de ce qu’est l’identité française.

D’ailleurs, soyons gentils avec Rousseau : il n’est pas français, il est suisse. Nous vivions alors à une époque heureuse où allègrement nous franchissions les frontières sans avoir à montrer patte blanche, où il n’y avait pas de débat sur la nationalité. Les Genevois essayèrent leur influence une première fois avec Calvin, ils y parvinrent avec Rousseau.

Comme Voltaire, comme nombre des auteurs publiés aux Editions de Londres, Rousseau se réfugie en Angleterre pour échapper à la persécution. Il rencontre David Hume qui l’influence beaucoup, et avec lequel il se brouille, comme il était d’usage à l’époque.

Le contrat social et la démocratie inachevée

Au final, il nous laisse une œuvre monumentale, fondamentale, diverse et homogène à la fois : « Les rêveries d’un promeneur solitaire », « La Nouvelle Héloïse », l’ « Emile », et évidemment Le Contrat social et le Discours sur l’origine et les fondements de l’inégalité parmi les hommes. Le Contrat social est vu comme le texte fondateur de la Révolution Française. Dans Le Contrat social que Les Editions de Londres publieront bientôt, EDL voit de nouveau les forces et les travers de la Révolution française, car si à la base du Contrat social on a un manifeste sur la souveraineté et le besoin d’un minimum d’égalité pour assurer la représentativité et donc la liberté collective, sans laquelle il ne saurait y avoir de liberté individuelle, Le Contrat social fait l’impasse sur l’essentiel selon nous (comme la Révolution Française) : l’équilibre entre les pouvoirs, qui pour EDL est sans aucun doute l’ingrédient indispensable à la durée de la Démocratie, non à sa proclamation. Et dans cet oubli, dans cet oubli marquant pourtant comblé par L’esprit des lois de Montesquieu réside l’origine des problèmes de la France, et son statut malheureux de démocratie pas terminée, une sorte de démocratie monstrueuse où le quotient intellectuel est surdimensionné par rapport au quotient émotionnel, une démocratie géniale, précoce, mais qui va de crise en crise depuis deux cent ans, alors qu’il suffirait de tout remettre à plat et de finir les fondations inachevées une fois pour toutes. Tout cela, on le doit à la prédominance de Rousseau.

Mais il y a aussi le Discours sur l’origine et les fondements de l’inégalité parmi les hommes, qui constitue un peu à nos yeux la rédemption de Rousseau, terme fort approprié pour un homme qui était avant tout un philosophe protestant.

© 2014- Les Éditions de Londres

LES CONFESSIONS

Voici le seul portrait d'homme, peint exactement d'après nature et dans toute sa vérité, qui existe et qui probablement existera jamais. Qui que vous soyez, que ma destinée ou ma confiance ont fait l'arbitre de ce cahier, je vous conjure par mes malheurs, par vos entrailles, et au nom de toute l'espèce humaine, de ne pas anéantir un ouvrage utile et unique, lequel peut servir de première pièce de comparaison pour l'étude des hommes, qui certainement est encore à commencer, et de ne pas ôter à l'honneur de ma mémoire le seul monument sûr de mon caractère qui n'ait pas été défiguré par mes ennemis. Enfin fussiez-vous, vous-même, un de mes ennemis implacables, cessez de l'être envers ma cendre, et ne portez pas votre cruelle injustice jusqu'au temps où ni vous ni moi ne vivrons plus, afin que vous puissiez vous rendre au moins une fois le noble témoignage d'avoir été généreux et bon quand vous pouviez être malfaisant et vindicatif ; si tant est que le mal qui s'adresse à un homme qui n'en a jamais fait ou voulu faire, puisse porter le nom de vengeance.

J.-J. ROUSSEAU.