Biographie de l’Auteur

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François Marie Arouet, dit Voltaire (1694-1778), écrivain, philosophe, libre-penseur, est un des symboles du XVIIIème siècle, de la France et l’une des figures majeures de la culture occidentale. Voltaire, avec Diderot, Rousseau, Montesquieu et Beaumarchais, c’est le Siècle des Lumières ; pour l’historien contemporain comme celui du XXVème siècle, c’est l’âge d’or de la France. Voltaire, on ne le présente plus. Au moment de la mise en ligne des Editions de Londres, on publie cinq ouvrages de lui, les Lettres anglaises ou Lettres philosophiques, Micromégas, Candide, Zadig, Histoire des Voyages de Scarmentado écrite par lui-même. Il y en beaucoup d’autres à venir.

Les Editions de Londres et Voltaire

Si Les Editions de Londres devaient chercher une muse, une inspiration, une lumière au loin sur l’océan qui perce la nuit obscurantiste, ce serait probablement Voltaire.

L’hommage de Nietzsche

En 1878, Nietzsche écrit Humain, trop humain. Un livre pour esprits libres et il le dédie à Voltaire à l’occasion du centenaire de sa mort. Dans son aphorisme 225, il écrit ce que les Editions de Londres considèrent comme le plus bel hommage à Voltaire et la plus belle attaque contre la bien-pensance moderne : « On appelle esprit libre celui qui pense autrement qu’on ne s’y attend de sa part en raison de son origine, de son milieu, de son état et de sa fonction, ou en raison des opinions régnantes de son temps. Il est l’exception, les esprits asservis sont la règle ; ce que ceux-ci lui reprochent, c’est que ses libres principes ou bien ont leur source dans le désir de surprendre ou bien permettent même de conclure à des actes libres, c’est-à-dire de ceux qui sont inconciliables avec la morale asservie. »

Voltaire l’esprit libre

Si l’influence de Voltaire sur son temps, sur la Révolution, sur notre époque, sont indéniables, plutôt que de faire son nième éloge ou de raconter gauchement l’histoire de sa vie, ou encore traiter de sa bibliographie, EDL voudrait tirer certaines règles de vie, certaines observations de la vie moderne, de l’exemple de Voltaire.

D’abord, pour être Esprit Libre, il faut assurer ses arrières. Voltaire s’installe en 1755 à la frontière franco-genevoise. A l’époque Genève est un Etat Indépendant. Si on veut lui chercher des noises, il passe la frontière. Vivre à quelques centaines de mètres d’un autre Etat, voilà le niveau de confiance adéquat que l’esprit Libre doit porter à ceux qui le gouvernent.

Ensuite, la mode et l’héritage sont deux choses bien différentes. Connu à l’époque pour son théâtre, ses poésies, ses ouvrages historiques, ces derniers sont maintenant ignorés, et Voltaire le dramaturge est surtout admiré pour ses romans et ses contes. Ce sont d’ailleurs les Contes que EDL admira dés le plus âge, quoique nous ayons une faiblesse pour les Lettres Anglaises, chose bien naturelle lorsque l’on s’appelle Editions de Londres.

Voltaire vivait à une époque bénie où il était bien vu de partir à l’étranger, d’aller chercher d’autres idées hors de nos frontières. D’ailleurs ces dernières étaient bien plus perméables qu’elles ne le sont maintenant, avec ou sans Schengen. Voltaire s’exile en Angleterre en 1726, et y reste jusqu’en 1733. Il réside à Berlin entre 1750 et 1753 où il fréquente Frédéric II de Prusse. Lors de la deuxième partie de sa vie, Voltaire est connu de Philadelphie à Saint-Pétersbourg.

Le courage est essentiel à l’esprit libre. En ces temps où on a l’habitude de séparer l’intellectuel et l’effort physique, sans être un fin bretteur, Voltaire a craint pour sa vie à plusieurs reprises. Lors de l’épisode du Chevalier de Rohan, il est tabassé par des laquais avec des gourdins puis embastillé. Avis aux intellectuels, la prise d’opinion implique la prise de risque.

Voltaire et notre temps

Enfin, quand on lit certaines des choses maintenant écrites sur Voltaire, avec cette manie moderne (nouvelle étape du politiquement correct, avec la réécriture des œuvres offensantes ; et le gommage des cigarettes dans les œuvres culturelles) de juger les anciens à l’aune de nos valeurs, on peut se demander si Voltaire aurait gagné sa réputation d’Esprit Libre à notre époque troublée ? Revenons à la définition de Nietzsche, et on pourrait affirmer que la libre-pensance de nos jours est souvent prise pour rébellion, provocation ou pire encore, la capacité de dire les choses qui correspondent mot pour mot à l’attente des recteurs de la morale moderne (une sorte de compassion multi-formes s’exerçant principalement à l’égard de ceux qui ont le bonheur d’être à la mode, au goût du jour).

Voltaire ne serait pas le bienvenu dans notre société surformatée où règne une morale féroce du langage. Voltaire s’en tamponnerait le coquillard. Les petits maîtres d’école avec leurs airs très contents d’eux-mêmes, il les laisserait parler, puis il les pourfendrait de quelques phrases bien léchées.

© 2011- Les Editions de Londres

Poème sur le désastre de Lisbonne

O malheureux mortels ! ô terre déplorable !
O de tous les mortels assemblage effroyable !
D’inutiles douleurs éternel entretien !
Philosophes trompés qui criez : « Tout est bien » ;
Accourez, contemplez ces ruines affreuses,
Ces débris, ces lambeaux, ces cendres malheureuses,
Ces femmes, ces enfants l’un sur l’autre entassés,
Sous ces marbres rompus ces membres dispersés ;
Cent mille infortunés que la terre dévore,
Qui, sanglants, déchirés, et palpitants encore,
Enterrés sous leurs toits, terminent sans secours
Dans l’horreur des tourments leurs lamentables jours !
Aux cris demi-formés de leurs voix expirantes,
Au spectacle effrayant de leurs cendres fumantes,
Direz-vous : « C’est l’effet des éternelles lois
Qui d’un Dieu libre et bon nécessitent le choix ? »
Direz-vous, en voyant cet amas de victimes :
« Dieu s’est vengé, leur mort est le prix de leurs crimes ? »
Quel crime, quelle faute ont commis ces enfants
Sur le sein maternel écrasés et sanglants ?
Lisbonne, qui n’est plus, eut-elle plus de vices
Que Londres, que Paris, plongés dans les délices :
Lisbonne est abîmée, et l’on danse a Paris.
Tranquilles spectateurs, intrépides esprits,
De vos frères mourants contemplant les naufrages,
Vous recherchez en paix les causes des orages :
Mais du sort ennemi quand vous sentez les coups,
Devenus plus humains, vous pleurez comme nous.
Croyez-moi, quand la terre entrouvre ses abîmes,
Ma plainte est innocente et mes cris légitimes.
Partout environnés des cruautés du sort,
Des fureurs des méchants, des pièges de la mort,
De tous les éléments éprouvant les atteintes,
Compagnons de nos maux, permettez-nous les plaintes.
C’est l’orgueil, dites-vous, l’orgueil séditieux,
Qui prétend qu’étant mal, nous pouvions être mieux.
Allez interroger les rivages du Tage ;
Fouillez dans les débris de ce sanglant ravage ;
Demandez aux mourants, dans ce séjour d’effroi,
Si c’est l’orgueil qui crie : « O ciel, secourez-moi !
O ciel, ayez pitié de l’humaine misère ! »
« Tout est bien, dites-vous, et tout est nécessaire. »
Quoi ! l’univers entier, sans ce gouffre infernal,
Sans engloutir Lisbonne, eût-il été plus mal ?
Êtes-vous assurés que la cause éternelle
Qui fait tout, qui sait tout, qui créa tout pour elle,
Ne pouvait nous jeter dans ces tristes climats
Sans former des volcans allumés sous nos pas ?
Borneriez-vous ainsi la suprême puissance ?
Lui défendriez-vous d’exercer sa clémence ?
L’éternel artisan n’a-t-il pas dans ses mains
Des moyens infinis tout prêts pour ses desseins ?
Je désire humblement, sans offenser mon maître,
Que ce gouffre enflammé de soufre et de salpêtre
Eût allumé ses feux dans le fond des déserts.
Je respecte mon Dieu, mais j’aime l’univers.
Quand l’homme ose gémir d’un fléau si terrible,
Il n’est point orgueilleux, hélas ! Il est sensible.
Les tristes habitants de ces bords désolés
Dans l’horreur des tourments seraient-ils consolés
Si quelqu’un leur disait : « Tombez, mourez tranquilles ;
Pour le bonheur du monde on détruit vos asiles ;
D’autres mains vont bâtir vos palais embrasés,
D’autres peuples naîtront dans vos murs écrasés ;
Le Nord va s’enrichir de vos pertes fatales ;
Tous vos maux sont un bien dans les lois générales ;
Dieu vous voit du même œil que les vils vermisseaux
Dont vous serez la proie au fond de vos tombeaux ? »
A des infortunés quel horrible langage !
Cruels, à mes douleurs n’ajoutez point l’outrage.
Non, ne présentez plus à mon cœur agité
Ces immuables lois de la nécessité,
Cette chaîne des corps, des esprits, et des mondes.
O rêves des savants ! ô chimères profondes !
Dieu tient en main la chaîne, et n’est point enchaîné [Note 1] ;
Par son choix bienfaisant tout est déterminé :
…/…

FIN DE L’EXTRAIT

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