Préface des Éditions de Londres

Les « Sonnets » sont un recueil de vingt-neuf sonnets d’Étienne de La Boétie. D’abord présentés dans le chapitre vingt-neuf du Livre un des Essais de Montaigne, Les Éditions de Londres vous proposent maintenant cette édition incluant la version des Sonnets en français du Seizième siècle et notre traduction (ou translation, ou adaptation) originale en français moderne. Le passage de l’un à l’autre se fait en sélectionnant le lien [O] pour retrouver la version originale et [M] pour revenir au français moderne.

Les Sonnets français

Le Sonnet fait son apparition en France au Seizième siècle. Si c’est le poète Maurice Scève qui introduit le Sonnet d’Italie, c’est Clément Marot qui en 1536 écrit le premier Sonnet en langue française. Puis, Ronsard, Du Bellay, s’y mettent aussi. Le Sonnet devient la forme poétique la plus courante au Seizième siècle puis tombe en désuétude. La Boétie suit le Sonnet marotique, ABBA, ABBA, CCD EED, mais en appliquant deux quatrains suivis d’un dystique puis d’un quatrain, ce qui donne (à l’exception du premier sonnet) ABBA ABBA CC DEED.

Date de composition des Sonnets

Il est difficile de dater ces Sonnets. On suppose que La Boétie les écrivit vers la fin de ses humanités et avant le Contr’Un, c’est-à-dire avant 1549. Disons que la date probable devrait se situer vers 1547 ou 1548. Toutefois, ces Sonnets surprennent par leur maturité, une maturité emprunte de pessimisme, marquée par le tragique du temps qui passe, l’ensemble s’articulant autour du prétexte amoureux. En cela ils évoquent les Sonnets de Shakespeare. Il les aurait donc écrits avant 1549, à moins qu’il ne l’ait fait plus tard, entre 1550 et 1562 ?

L’intégration des Sonnets dans les Essais

L’époque de composition des Essais est une époque encore plus difficile que celle que connut La Boétie, c’est une époque de guerre civile alimentée par la dissension religieuse. Montaigne connaît le Discours de la servitude volontaire, et c’est certainement pour prévenir la censure et protéger la réputation de son ami qu’il décide de ne pas l’inclure dans les Essais. Toutefois, il lui faut rendre hommage à son ami de toujours, à l’aîné qui l’influença tant. Alors, il va évoquer le Contr’Un, en parler comme d’une erreur de jeunesse et afin de payer son du, il incorpore les « Sonnets ». C’est le moins qu’il puisse faire. 

L’originalité des Sonnets

Si le thème amoureux semble être au centre des Sonnets, c’est encore une fois une illusion, un voile délicat dissimulant la réalité de l’époque difficile dans laquelle vit La Boétie, et cette époque difficile se retrouve dans les thèmes du temps qui passe, de la souffrance, de l’abandon, ce qui évoque (selon Xavier Darcos) la « branloire pérenne » de Montaigne : « Le monde n’est qu’une branloire pérenne : toutes choses y branlent sans cesse, la terre, les rochers du Caucase, les pyramides d’Égypte… ».

Et voici La Boétie : « Que m’a servi de tant d’ans la longueur Elle n’est pas de ma peine assouvie… »

Bonne question.

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