Préface des Editions de Londres

La « Suite de l’Entretien entre D’Alembert et Diderot » de Diderot, écrit en 1769, est le troisième d’une série de trois dialogues philosophiques connus sous le nom de « Rêve de D’Alembert », et constitué de l’Entretien entre D’Alembert et Diderot, Le Rêve de D’Alembert, c’est-à-dire le deuxième et pas l’ensemble (puisque le deuxième et le plus fascinant des trois dialogues a donné son nom à l’ensemble), puis le troisième dont il s’agit ici, la « Suite de l’entretien entre D’Alembert et Diderot », précédemment évoqué.

Deux protagonistes dans un dialogue court

Si l’Entretien entre D’Alembert et Diderot a deux protagonistes, D’Alembert et Diderot, la « Suite de l’entretien entre D’Alembert et Diderot » ne parle ni de D’Alembert ni de Diderot, et a pour protagonistes les mêmes que dans le Rêve de D’Alembert moins D’Alembert, c’est-à-dire le médecin Bordeu et la jeune Mademoiselle de l’Espinasse dont la langue n’est pas restée dans la poche.

Comme les deux autres dialogues, la « Suite de l’entretien… » est seulement publié en 1796, en pleine Révolution, douze ans après la mort de Diderot. Il faut rappeler que les contemporains de Diderot ne connurent pas ses œuvres, en dehors de ses proches et de ses amis. On découvre en fait les chefs d’œuvre de Diderot alors que le siècle des Lumières est déjà tombé dans l’obscurité. Et c’est bien dommage. A l’instar des deux premiers dialogues, la « Suite de l’entretien… » est un texte révolutionnaire. Il est dans la lignée de la philosophie matérialiste énoncée, voire démontrée, dans Le Rêve de D’Alembert, et développe quelques thèmes moins élaborés dans les deux dialogues précédents.

Le sexe dans la « Suite de l’entretien… »

Plus que les autres dialogues, la courte « Suite de l’entretien… » s’attarde longuement sur le sexe, et préfigure en cela certains des passages du Supplément au voyage de Bougainville. Diderot déconstruit le rôle de la morale dans l’effacement du sexe en tant que ressort et condition de la vie humaine. Pour cela, Diderot met dans la bouche d’une jeune femme du Dix Huitième siècle des propos assez durs à l’encontre de la chasteté, imposée ou volontaire, et défend la masturbation comme palliatif à la chasteté forcée par les règles sociales inadaptées à notre état naturel. Au passage, il blasphème en évoquant le baptême d’un Orang Outang, il critique les traitements que l’on fait subir aux colonies…

Pour sûr, la « Suite de l’entretien entre D’Alembert et Diderot », ce n’est pas non plus Sexus, Nexus, Plexus de Henry Miller, mais ce qui unit les deux écrivains contestataires, c’est ce dégoût des idées reçues et de la morale de champignons, morale dont l’objectif est avant tout la conservation de l’étant et donc le pourrissement. Cela, ni Diderot ni Miller ne peuvent le supporter. Ils s’inscrivent en faux, et chacun à sa manière, ils s’attachent à rétablir la vérité sur l’humain.

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